Ça dégénère. Nuit après nuit, manifestation après manifestation, ça dégénère. Et ce 1er mai, les slogans contre la police les CRS et de gendarmes mobiles. ont rarement été aussi hargneux. Et ces derniers, rarement autant sur les dents. En même temps, lorsque quelques centaines d’extrémistes vont à l’affrontement, il est difficile d’attendre des forces de l’ordre qu’elles leur déroulent un tapis rouge.
Si les défilés du 1er Mai se sont déroulés avec bien moins de débordements que les manifestations de jeudi dernier, il est cependant à craindre que le syndrome Malik Oussékine ne refasse surface avec plus de vigueur encore.
Souvenons-nous ! Dans la nuit du 6 au 7 décembre 1986, en plein mouvement étudiant contre la réforme de l’université, deux policiers de la brigade motocycliste avaient tué à coups de matraque un étudiant de 22 ans, rue Monsieur le Prince, dans la VIe arrondissement de Paris. Alain Devaquet, le ministre délégué de l’Enseignement supérieur, avait présenté sa démission le lendemain, son projet de loi avait été retiré, et il fut beaucoup dit que cette mort, sous un porche d’immeuble, avait peut-être coûté l’élection présidentielle de 1988 à Jacques Chirac.
Si l’on attend des forces de l’ordre qu’elles fassent prévaloir l’ordre public sur la force armée, dans le respect des règlements, il ne faut pas se cacher qu’en dépit des bavures et autres cas isolés, ces hordes de "casseurs", mélange d’excités, de désoeuvrés et d’ultras de la mouvance "autonome", sont plus que jamais décidés à les harceler, avec d’autant plus de détermination que la conjonction de manifestations à répétition et d’un gouvernement impopulaire leur en fournit un cadre propice.
Sur le pied de guerre.
Photo © Marie Max Moulin
Paris 1er Mai 2016
Il revient au gouvernement de tout mettre en oeuvre pour les neutraliser en les ciblant précisément avant, pendant ou après, en prenant la mesure du risque encouru lors de ces manifestations continues, à les départager des manifestants. Et les faits sont là. La liste s’allonge dangereusement de jour en jour. Interpellations policières devant les lycées (Colombes et Bergson à Paris, le 24 mars...) ; matraquages et violences (Nantes les 24 et 31 mars...) ; évacuations dans les facs occupées (Tolbiac le 17 mars, Rennes 2 le 15 avril) ; manifestations empêchées et interpellations par dizaines ; peines de prison ferme avec mandat de dépôt à Paris, Lyon, Montpellier ; gazages systématiques (Vaulx-en-Velin, le 13 avril sur le périphérique) ; interpellations au domicile et mise en examen de lycéen(ne)s, (lycée Voltaire à Paris le 1er puis le 14 avril) ; envoi de troupe (Strasbourg le 9 avril...) ; encadrement des manifestations sur les côtés et en tête des cortèges avec doubles cordons de CRS ; utilisation de drones pour surveiller les manifestants (Paris, le 14 avril...) ; survol des manifestations et lâchage de gaz lacrymogènes par des hélicoptères (Place de la Nation, à Paris, le 9 avril) ; tirs répétés de flashball et de bombes de désencerclement ; barrage de CRS pour empêcher les manifestations syndicales d'arriver au terme de leur parcours autorisé (place de la Nation à Paris le 9 avril). Le 20 avril, à Lille, c'est un local syndical qui est forcé et dévasté par la police au prétexte de "chercher des manifestant(e)s". Aujourd'hui, les interpellations massives se multiplient, sans parler des bavures (un scooter renversé à Rennes le 28 avril par une voiture de police qui a pris la fuite), des dizaines de blessés, dont un étudiant ayant perdu un œil à Rennes, deux militants CGT PSA Rennes et Tremery condamnés à de la prison ferme, deux cheminots CGT de Villeneuve St Georges en garde à vue après le 28 avril, le camion de Solidaire touché par des tirs de grenade lacrymogène et flashball à Marseille, évacuation ultraviolente de la République à Paris le 28 avril au soir, gazage et matraquage à l'Odéon des soutiens aux occupants du théâtre... la liste est longue. (source : Médiapart).
Dimanche, 16 000 personnes ont manifesté à Paris, selon la police. 70 000 pour les syndicats. Ce défilé du 1er Mai devait être consacré à contester la loi travail. Il se sera transformé, en tête de cortège, en mouvement contre la violence policière, très rapidement réprimé. À 20 heures, les derniers participants au traditionnel défilé du 1er mai ont quitté la place de la Nation, destination finale de la manifestation partie de Bastille, dans un nuage de gaz lacrymogène. Tirs de grenades lacrymogènes ou de flash-ball, charges contre les manifestants, insultes et coups de matraques, évacuations musclées, arrestations arbitraires, un jeune homme qui perd un oeil, un policier victime d'une fracture du crâne, ces dernières semaines, on a vu les violences monter d’un cran et les atteintes aux droits constitutionnels de faire grève et de manifester, se multiplier.
Selon la police, le 1er mai dix-huit personnes avaient été interpellées et deux blessés. Et depuis le début des manifestations contre la loi du Travail el Khomery, 300 policiers auraient été blessé, selon Bernard Cazeneuve. Est-il possible, pour la préfecture, de donner avec autant de précision les chiffres des policiers blessés et ceux des manifestants blessés ? Le veut-elle seulement ? Éléments de réponse avec MetroNews :
VIDEO - Violences policières : l'impossible recensement des manifestants blessés ?
A chaque mouvement social, son lot d'affrontements entre les forces de l'ordre et manifestants (casseurs ou non). Et à chaque affrontement, le même rituel : la préfecture communique précisémen...
Un peu partout en France, des manifestants se disent victimes de violences policières. Des vidéos et photos font le tour des réseaux sociaux mais, les autorités ne semblent pas constater une montée des dérapages des forces de l'ordre. Attendraient-il un retour de flamme ? Une réplique sismique après l’épisode d’amour qui leur a été réservé par la population après les attentats de Paris et notamment Charly ? Un an et demi de douche écossaise. Cela fait un an et demi, que la population et les forces de l’ordre jouent à ‘’Je t’aime, moi non plus’’. Mais là, le torchon brûle. Et ce n’est pas sans raison que les organisations contestataires sont promptes à ne voir dans les échauffourées que la seule dureté policière :
Toute une partie de la gauche n'en peut plus d'attendre le retour de la droite. Pour tuer le temps, le printemps revenu, elle répète ses standards de la "convergence des luttes" avec ce qu'elle a...
http://www.slate.fr/story/117469/bon-usage-casseurs-violence-police
Pour Médiapart, dans un article titré ‘’La fabrique de la violence ‘’, ce 1er mai nous a fait respirer plus de gaz que de muguet. Et la manifestation parisienne aura confirmé que l’Etat est le premier organisateur de la violence. Avec la collusion de quelques médias qui lui servent de ventriloques, il cherche à mettre en scène une décrédibilisation et une criminalisation du mouvement social. Et pour Pascal Maillard, cette double manipulation ne doit pas passer :
La fabrique de la violence | Le Club de Mediapart
Ce 1er mai nous a fait respirer plus de gaz que de muguet. La manifestation parisienne aura confirmé que l'Etat est le premier organisateur de la violence. Avec la collusion de quelques médias qu...
https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/020516/la-fabrique-de-la-violence
Bien, la fin de ce papier. ‘’C’est à Paris, Boulevard Diderot, qu'un pouvoir socialiste aura décapité une manifestation du 1er mai, et noyé le peuple dans un nuage lacrymogène. Mais le nuage et les larmes se dissipent. Les lumières se rallument sur les places. Et c'est Debout que les insoumis éclairent la Nuit.’’ Peut-être, en pensant à Rémi Fraisse ?
En novembre 2014, Rémi Fraisse, est tué par une grenade offensive lancée par un gendarme lors des affrontements entre des opposants au projet de barrage de Sivens (Tarn) et des militaires. La France entière s’émeut.
Par ici, le récit du le récit du gendarme qui a lancé la grenade :
Rémi Fraisse : le récit du gendarme qui a lancé la grenade
Le maréchal des logis chef J. a lancé la grenade mortelle. A 32 ans, il est au coeur d'une polémique sur l'usage de ce type de grenades - interdites jeudi 13 novembre par le ministre de l'intér...
Il est loin le temps où, en janvier 2015, des haies d’honneur et des concerts d’applaudissement accompagnaient militaires et policiers qui avaient mis hors d’état de nuire les assassins de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher et qui, eux aussi, avaient été victimes de la furie terroriste. Un mois après les attentats du 7 au 9 janvier qui ont fait 17 morts dont deux policiers le mercredi 7 janvier contre "Charlie", et une policière fusillée à Montrouge le lendemain, un sondage Odoxa dévoile que 84% des Français âgés de plus de 18 ans ont une bonne opinion des 110 000 fonctionnaires de la police. Ce qui faisait une progression de 20 points par rapport à une autre enquête réalisée en octobre 2014. À la fois étonnés et touchés par la soudaine reconnaissance à leur égard, les policiers espéraient qu'après l'euphorie collective, les Français n'oublieront pas. Raté :
Depuis le vent a tourné. Et la tension est palpable depuis la diffusion d’une vidéo dans laquelle un policier assenait, en marge d’une manifestation contre le projet de loi sur le travail le 24 mars, un coup de poing à un lycéen de l’établissement parisien Henri-Bergson.
L’auteur, un gardien de la paix de 26 ans, sera jugé en mai pour ‘’violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique’’ sur le lycéen de 15 ans. Il avait été placé en garde à vue à l’Inspection générale de la police judiciaire (IGPN), la “police des polices”.
Mais le mal est fait, la rupture consommée. Surtout que la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) relaie une seconde vidéo de violences policières aux abords du lycée et que, dans la foulée, les réseaux sociaux et les médias se font l’écho d’autres incidents.
À Nantes, le procureur de la République a saisi l'IGPN, la "police des polices", pour savoir si le blessé de la vidéo tournée par des riverains, diffusée sur le site du quotidien nantais, avait ou non été victime de violences de la part de la police. On y voit l'homme, en pull-over et portant un mégaphone en bandoulière, à terre une première fois, entouré de plusieurs membres des forces de l'ordre. Après qu'il se soit relevé et éloigné, il est à nouveau projeté à terre avant d'être emmené le long d'un mur, saignant du visage. Placé en garde à vue avant d'être relâché sans poursuite, l'homme a dû se faire poser sept points de suture à la tempe.
À Lyon, un collectif se forme pour déposer plainte ensemble. Il s’agit d’un regroupement de personnes qui ont été hospitalisées au cours même de la manifestation celle du 28 avril, pour des blessures importantes, ainsi que des personnes qui ont pu finir la manifestation mais qui ont constaté à l’arrivée qu’elles avaient pris cher, ou encore des personnes qui ont simplement un hématome visible. Comme cet homme âgé qui ne présentait aucune menace et qui a reçu un jet de canon à eau censé disperser des casseurs :
VIDEO. Loi Travail : un homme âgé visé par un canon à eau en fin de manif
Lyon, place Bellecour. Les manifestants se dispersent après avoir participé au cortège contre la loi travail portée par la ministre El Khomri, jeudi 31 mars. Certains décident de rester, refus...
Des histoires comme celle-ci, il y en a à foison. Le site militant Rebellyon recense même les dérapages policiers et donne des conseils à ceux qui sont accusés, à leur tour, d’avoir agressé des représentants des forces de l’ordre :
Rebellyon.info - Site collaboratif d'infos alternatives
Site d'informations alternatives et anti-autoritaires sur Lyon et sa région, participatif et collaboratif.
La presse militante n’a pas attendu la multiplication des pure-players pour investir le web. Rebellyon.info en est la preuve. Depuis sa mise en ligne en 2005, ce site relaye l’information "alternative", de Lyon et d’ailleurs. Et donne un coup de vieux aux fanzines et autres journaux engagés vendus à la criée.
Autre site à porte la contestation dans son ADN, celui de Paris-luttes.info. Site coopératif d’infos et de luttes Paris-Banlieue, Paris-luttes.info, se présente comme étant ‘’aussi bien un relais qu’une caisse de résonance des luttes, résistances et conflictualités en cours, dans Paris et ses banlieues’’. Il dit s’inscrire dans une ‘’perspective anticapitaliste, anti-autoritaire et révolutionnaire’’, cherchant à diffuser’’ infos, récits, réflexions, témoignages et appels à agir’’ :
Aux yeux de beaucoup, il est temps de pointer désormais les outrances régaliennes du régime, ses ‘’violences policières’’ et ses trahisons des libertés par l’état d’urgence. Samedi dernier, le syndicat Info'Com de la CGT, représentant des salariés du monde de l'information et de la communication, a mis un coup de pied dans la fourmilières des convenances entendues et publié sur son site une affiche sur laquelle on peut voir une matraque et un insigne de CRS près d'une flaque de sang avec le titre suivant :
« La police doit protéger les citoyens, non les frapper ».
Ce visuel, qui fait référence aux violences policières commises contre des jeunes pendant les manifestations contre le projet de loi sur le travail, a suscité l’indignation de Bernard Cazeneuve. Le ministre de l’intérieur a dénoncé "une campagne choquante qui met gravement en cause la police nationale", tandis que les syndicats s’insurgeaient contre ‘’une affiche de la honte, une injure aux milliers de policiers et gendarmes blessés dans l'exercice de leur fonction’’ allant même jusqu’à demander au ministère de l'intérieur de déposer plainte, évoquant un "appel abject à la haine et à la violence contre les forces de l’ordre".
Le 15 avril, à la veille de la diffusion de l'affiche d'Info'com-CGT, la photojournaliste Jan Schmidt-Whitley avait immortalisé le coup de pied d'un CRS contre une jeune femme, après des débordements lors d'une manifestation de lycéens, où quatre manifestants et sept policiers avaient été blessés.
Et la CGT récidive. Une photo de forces de l'ordre en uniforme, un sol tâché de sang, surmontés d'un "Loi travail Stop à la répression a été postée le soir du 1er mai sur son compte Facebook. C'est la deuxième fois que l'organisation syndicale publie une affiche controversée, faisant largement référence à des violences policières qui auraient été commises contre des jeunes pendant les manifestations contre le projet de loi Travail. Un montage-photo qui, une fois encore, ne plaît pas du tout aux syndicats de policiers.
Tribune ouverte sur ce sujet à l’auteur, éditeur (si, si), découvreur de plumes, penseur, photographe, ancien punk, ancien peintre, amateur de pommes, de queues de cerises et de nèfles, fondateur de Revue Métèque (4ème numéro paru en janvier 2016) aux Éditions Lunatique qu'il a fondé, Jean-François Dalle.
Voulez-vous une bonne raison pour ne pas lire ce texte ? Et c’est Jean-François Dalle lui-même qui me l’a soufflé dans un onglet de son site 10 bonnes raisons de ne pas lire . Je vous en donne une, bonne raison. L’éducation nationale l’a trop formé. Donc il ne peut pas faire une phrase inédite. Du reste, son père était prof de français. Son ADN est trop polissé. Il ne fait que des arabesques … Des entrechats. Si vous êtes de vrais amis, ne l’encouragez pas à minauder.
Pas convaincus ? Par ici le coup de gueule !
« Propos de ((((F A C H O))))
Le "baiser", ostensiblement face caméra, le "baiser-manifeste", le "baiser remake Cohn-Bendit", lui ayant donné une rose à un CRS...
Déjà, on sait que Doisneau avait pipoté sa photo : sur la place de l'Hôtel de Ville, le "baiser volé" des amoureux n'étaient pas fortuit, mais instigués par Doisneau himself. Des acteurs s'embrassaient au signal... Ils cachetonnaient.
Ce qui me navre/gave, c'est cette pauvre propagande pacifiste, c'est ce trafic bon marché de l'amour.
Et puis, quand cessera-t-on de s'alarmer des violences policières ?! Un CRS est formé pour être un bœuf, un abruti sans cœur. On l'équipe pour faire de cet abruti, un danger. Connaissez-vous des CRS venant des beaux quartiers, ayant fait Normal Sup ?! Jankélévitch aurait-il fait un bon CRS ? Et Françoise Sagan ? Nan ?
Cessez de vous cachez derrière votre petit doigt. De Détroit, en passant par Le Caire, jusqu'à Moscou, les opérations de maintien de l'ordre sont confiées à des pauvres, entrainés pour être des hommes-machines. Des chiens.
Comme ils ne sont que des machines-chiens, passez à d'autres ennemis.
Bref, soyez Ravachol, ou mettez-la un peu en veilleuse, mes chers amis.
Jean-François Dalle »