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ZiK et ZinC

La culture alternative est un vivier d’expressions en marge.

Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.

Publié le 26 Avril 2016 par DB-RBV

Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.

Ses mélanges de calligraphie arabe et de graff, qu’il a baptisé calligraffie avec 2 ff, déroulent toujours sous leurs volutes en apparence abstraites, un sens secret, caché. Et yallah ! Les citations sont choisies en fonction des lieux, de leur histoire et de leur identité. Avec sa dernière œuvre, l’artiste de rue El Seed a poussé son geste à une échelle inégalée, donnant au passage une visibilité internationale à un quartier mal considéré du Caire.

Le 15 mars, ce Français d’origine tunisienne, âgé de 34 ans, révélait sur des réseaux sociaux son tour de magie. Une anamorphose recouvrant près de cinquante immeubles. Elle n’est visible dans son intégralité qu’en en prenant de la hauteur. Pour reconstituer le diamant ou le fagot dans son ensemble, il faut monter au monastère du Mokattam, une montagne sèche, aux allures de colline, qui domine Le Caire. Selon la légende, cette ‘’montagne’’ aurait été déplacée là, au Xe siècle, par le pape copte Abraham d’Alexandrie, thaumaturge mais pragmatique. Il voulait ainsi montrer au calife de l’époque ce que signifiait l’expression ‘’avoir la foi qui déplace les montagnes’’. Il reste quelque chose de ça, aujourd’hui, avec l’œuvre d’El Seed. Qu’on peut enfin déchiffrer en prenant du recul et de la hauteur. Les mots de cette pelote de graff, où les morceaux épars se recomposent alors, sont une phrase :

‘إن أراد أحد أن يبصر نور الشمس، فإن عليه أن يمسح عينيه

‘’Si quelqu’un veut voir la lumière du soleil, il faut qu’il se frotte les yeux’’.

Une citation de l’évêque copte du IIIe siècle Athanase d’Alexandrie, figure majeure du christianisme antiqu
e, qui résume l’objectif d’El Seed, mettre la lumière sur la communauté copte. Dans le quartier de Manchiet Nasser, au Caire, cette communauté copte de Zaraeeb collecte les ordures de la ville depuis des décennies. Elle a mis au point le système de recyclage le plus efficace et le plus rentable au niveau mondial. Et pourtant, cet endroit marginalisé est perçu comme sale et à part. Tout comme ses habitants, les zabbalines (les ramasseurs d’ordures /éboueurs). D’où le titre du projet de El Seed. ‘’Perceptions’’.

Quelque 65 000 personnes, majoritairement de religion chrétienne copte, y vivent autour d’un écosystème mis en place dans les années 1940. Monté en puissance dans les années 1980, il devint un véritable ‘’tube digestif’’ urbain où les déchets de la ville sont rassemblés après collecte pour être triés. La situation s’y est dégradée à partir de 2003, année où les autorités, sous le régime de Hosni Moubarak, ont décidé de confier la gestion des déchets à de grandes en
treprises internationales.

Malgré des performances exceptionnelles en termes de recyclage, le taux obtenu par les différentes sociétés privées atteindrait de 2 % à 8 %, contre près de 80 % pour les "zabbalines".

En 2013, face à l’inefficacité des collectes officielles, la ville faisait marche arrière sous la houlette du ministère de l’environnement et du syndicat des "zabbalines", afin d’officialiser enfin le travail de quarante-quatre entreprises de collecte locales, impliq
uant la main-d’œuvre de pas moins de mille familles.

Par son œuvre pharaonique, El Seed rend hommage aux membres de cette communauté de l’ombre, vus comme des parias. L’aventure a demandé un an de préparation à l’artiste et près d’un mois de travail en équipe sur des nacelles suspendues à travers tout le quartier. Une immersion qu’il qualifie d’expérience humaine exceptionnelle avec les habitants, qui ont soutenu ce projet artistique inédit en Égypte.

Par ici la vidéo de cette magnifique opérat
ion artistico-humaniste :

Les fresques d'El Seed se veulent une ode à la tolérance. Elles expriment le besoin de vivre en paix tout en respectant les autres. En septembre 2012, celui dont le surnom est inspiré du Cid qu’il étudiait au lycée à 16 ans, lorsqu’il appris que le titre cornélien venait du mot arabe ‘’el sayed’’ qui signifie ‘’le maître, l'homme’’ et se le choisit comme blaze, fut invité à peindre sur une face du minaret de la mosquée Jara à Gabès, un graffiti reprenant un verset du Coran sur l'enseignement de la tolérance.

Photos © El Seed Facebook wall.

Photos © El Seed Facebook wall.

Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.

En avril 2013, l’artiste a achevé 52 fresques, dont le travail a commencé en 2010, exposées sur l'avenue principale de Doha au Qatar ornant les murs de quatre tunnels de 200 mètres de long.

L’année d’après, El Seed a réalisé une œuvre sur l’Institut du monde arabe, à Paris. Sur cette fresque murale de 800 m2 sur la façade extérieure bétonnée coté Seine est écrit: ‘’L'amour est le miracle des civilisations’’.

Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.

Avec Jace, Brusk et Pantonio, il est intervenu sur 56 panneaux du Pont des Arts débarrassé de ses 45 tonnes de cadenas, soit 150 mètres de frises.

Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.

Site de El Seed :

Page Facebook d’El Seed d'où sont extraites es photos de cet article :

Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.
Le graffeur El Seed, rend un hommage pharaonique aux chiffonniers du Caire.
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